Dans une calanque près de Marseille, au creux de l'hiver, Angèle, Joseph et Armand se rassemblent autour de leur père vieillissant. C'est le moment pour eux de mesurer ce qu'ils ont conservé de l'idéal qu'il leur a transmis, du monde de fraternité qu'il avait bâti dans ce lieu magique, autour d'un restaurant ouvrier dont Armand, le fils ainé, continue de s'occuper. Lorsque de nouveaux arrivants venus de la mer vont bouleverser leurs réflexions...
La Villa: retrouvailles au bord de l'abîme
Robert Guédiguian réunit ses acteurs fétiches dans son vingtième long-métrage, film délicat sur le temps qui passe.
Au début, il y a la fin. Un vieil homme tanné, songeur, accoudé à la terrasse d'une maison dominant la calanque (dite de Méjean). Le temps de regarder, une dernière fois en conscience, la beauté familière du site, les maisons modestes et multicolores, le viaduc en surplomb, la mer scintillante à l'horizon. Puis dire tant pis et s'écrouler. Fin du paradis prolo, l'histoire peut commencer.
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Quelle est donc cette magie ? Ni plus ni moins que celle du cinéma de Robert Guédiguian, qui remet sur le métier depuis trente ans les mêmes acteurs dans une distribution à chaque film différente, mais que l'oeuvre ressaisit dans la durée, feuilletonnant leur présence comme une fiction toujours disponible, qui n'est autre que celle de la communauté qu'ils ont fini par former avec les spectateurs.
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Mais comment être encore jeune dans un monde racorni ? Et comment être juste, selon le mot de Brecht, dans un monde qui ne l'est pas ? L'ultime inflexion narrative du film, infiniment touchante, répond à cette question. Elle est à la fois concrète et mythologique. Elle consiste en l'accueil et en la protection d'une fratrie en miroir, enfantine et démunie, droit sortie des eaux. Générosité d'un geste, planté comme une graine dans le coeur de l'avenir. De sorte que le monde, qui appartient à tous les hommes, puisse un jour refleurir. De sorte qu'à la fin, il y a le début. (Le Monde - Jacques Mandelbaum )